Compagnie théâtrale des Déniapés

La pipistrelle, le dromadaire, le pangolin

et … le coronavirus

Fable en alexandrins

Christine Lazzerini - 2019

(Membre de la Compagnie des Déniapés)

Lassée de la pénombre et de ses turpitudes,

Une vieille chauve-souris en mal de solitude

Veut transformer sa vie, ses mœurs, ses penchants,

En prenant la tangente un beau soir de printemps.

Par-delà les nuages, les montagnes, les dunes,

Elle se pose harassée et voit son infortune :

Rien pour passer le jour, pas de grange ni de grotte,

Rien pour s’alimenter mis à part une crotte.

L’espoir retrouvé, la pipistrelle comprend

Que le propriétaire de ce bel excrément

Est un meilleur présage pour un festin de roi…

Un dromadaire rumine justement à dix pas.

Le mammifère bossu la regarde stoïque,

Affamée mais lucide, elle le trouve sympathique,

Renonce à son projet,  jugeant qu’il est trop grand

Et le vent la transporte jusqu’au soleil levant.

Après un long voyage, elle tombe dans les bambous,

Le territoire privé d’un gros pangolin fou,

L’artichaut sur ses griffes, courroucé l’invective,

La pauvresse chancelante sort deux incisives.

Il voit en cette intruse une ennemie jurée,

Elle mord cruellement avant de s’envoler.

Nos trois protagonistes, que sont-ils devenus ?

Le monde entier l’ignore et, s’ils ont disparu,

D’une morsure naquirent des millions « d’habitants »

Invisibles à l’œil nu, diablement virulents.

Que diront nos trois amis de cette histoire ?

Que chacun d’entre soi et en toute conscience

en invente la morale.